Comment savoir si Dieu nous accepte tel que l’on est ?

Je ne mettrai pas dehors celui qui vient à moi  (Jean 6,37)

Voilà un verset qui me tient à cœur, qui m’a portée dans mon parcours personnel et je souffre au fond de mon être chaque fois que j’apprends que quelqu’un a été rejeté par une communauté du fait de son orientation sexuelle, de sa couleur de peau, de son appartenance à une autre confession ou à une autre religion. A mes yeux, l’Eglise, aujourd’hui, se doit de refléter les valeurs qui étaient celles de Jésus.

Alors, je vous pose une question : qui est-ce que Jésus aurait rejeté, exclu ?

Les vendeurs du temple ?

Oui, il est dur envers les vendeurs du temple, mais il a une raison : ceux-ci offrent aux gens la possibilité de marchander avec Dieu : je t’offre un bœuf si tu fais ce que je te demande. C’est la vraie foi qui est en jeu ! C’est pour cela que Jésus se fâche. Il ne rejette pas les gens, mais il les fait réfléchir sur ce qu’ils communiquent par ce marché.

Il se met aussi en colère face aux Pharisiens qui font de la foi une morale au lieu de tout faire pour aider les gens à progresser dans leur relation avec Dieu.

Jamais Jésus n’est moralisateur, ce qui compte, pour lui, c’est d’attirer tous les hommes à Dieu.

Les gens qu’on montre du doigt ?

Jésus démontre qu’il ne vient pas pour faire la morale en mangeant avec des prostituées et des collecteurs d’impôts, eux qui étaient marginalisés du fait de leur mode de vie. Or, Jésus ne dit mot de leur comportement ; il ne les culpabilise pas, si bien qu’ils réalisent que Jésus n’est vraiment pas comme les maîtres de la loi et ils en sont bouleversés. Ils prennent conscience qu’ils ont, à côté d’eux quelqu’un d’extraordinaire, au point que certains vont changer de vie, de leur plein gré, sans que Jésus n’aie fait pression sur eux. Donc Jésus ne rejette pas ceux dont le mode de vie posait problème.

Alors, y a-t-il quelqu’un que Jésus rejette ?

En général, quand je pose cette question, on me répond qu’il a dit à la femme prise en flagrant délit d’adultère de ne plus pécher, laissant entendre que Jésus n’acceptait pas n’importe quoi, ce avec quoi je suis d’accord.

Mais j’essaie d’attirer l’attention de ces personnes sur les critères de Jésus.

Et la femme prise en flagrant délit d’adultère ?

Revenons sur ce qu’il s’est passé le jour où tous voulaient mettre cette femme à mort en lui jetant des pierres, par obéissance à ce qu’ordonne l’Ancien Testament. Jésus ne leur dit pas d’appliquer la loi, il innove : « que celui qui n’a pas péché lui jette la première pierre », invitant ainsi chacun, avant d’accuser l’autre, à se demander s’il n’a pas lui aussi certaines choses à se reprocher. Vous remarquerez que l’homme avec qui elle a commis l’adultère n’est pas mis en cause, et pourtant, il est peut-être parmi eux ce jour-là ! Donc tous prennent conscience qu’ils ne sont pas mieux qu’elle et ils s’en vont.

Jésus, on pourrait se dire que, n’ayant pas commis de péché, il serait le seul à avoir le droit de lui jeter la pierre. Or, que fait-il ? Il lui dit, moi non plus, je ne te condamne pas ! C’est tellement important ! En général, les gens n’entendent pas cette parole et passent tout de suite à la suivante. Or, on ne peut comprendre « Va et ne pèche plus » si on n’a pas compris la profondeur, la grandeur de cette affirmation : « Je ne te condamne pas ! ». C’est un appel à un changement de vie en profondeur, à un attachement à Dieu. Un Dieu qui nous condamne, on n’a pas envie de s’y attacher !
Si, dans nos paroisses, nous étions un peu plus comme Jésus, à ne pas condamner les personnes considérées comme pécheresses, il y aurait plus d’amour véritable. Nous serions davantage unis et le monde croirait davantage, car c’est l’authenticité de notre amour qui seul peut bouleverser notre société.

La Samaritaine ?

De même, lorsque sur la margelle du puis, Jésus accepte de recevoir de l’eau de la part d’une Samaritaine, en soi, il fait preuve d’une grande ouverture, car la loi juive le lui interdit. De plus, il sait très bien qu’elle a eu cinq maris et qu’elle n’est pas mariée avec l’homme avec qui elle se trouve actuellement. Mais quand il lui révèle qu’il sait tout sur son statut matrimonial, sur quel ton le fait-il ? Sur un ton accusateur ? Si c’était le cas, pensez-vous qu’elle aurait couru dans son village pour dire à tout le monde « Venez voir un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait ». Pensez-vous que les foules auraient accouru vers Jésus si c’était pour se faire reprocher toutes leurs méfaits ? Non, bien au contraire, Jésus dédramatise sa situation et révèle que, pour lui, la seule chose qui compte, c’est d’adorer Dieu en Esprit et en vérité. Jésus ne porte aucun jugement sur sa vie sexuelle, ça ne l’intéresse pas ! Seule sa vie spirituelle le préoccupe.

Que fait-il pour la femme qui perd du sang ?

Mais peut-être me direz-vous « Oui, d’accord, il a été bienveillant par rapport à ces deux femmes, il a même guéri la femme aux pertes de sang, lui permettant ainsi d’avoir une vie sexuelle, car tant qu’elle avait des pertes de sang, elle était impure, aucun homme ne pouvait s’intéresser à elle. Donc non seulement Jésus l’a guérie d’une maladie pour laquelle elle avait dépensé tout son argent, mais en plus, il lui a donné accès à une vie affective.

Mais les homosexuels…

Vous me direz : avec des homosexuels, Jésus se serait comporté autrement, il leur aurait dit qu’ils ne pouvaient pas être homosexuels et disciples du Christ ! Le problème est que Jésus n’a pas rencontré d’homosexuels, donc on ne peut pas le savoir.

Le centurion romain qui aime son serviteur…

Eh bien, détrompez-vous. Probablement qu’il y avait autant d’homosexuels de son temps qu’il y en a aujourd’hui. Il y avait probablement aussi des bisexuels. Le centurion romain par exemple, qui dit à Jésus combien il aime son serviteur et qui lui demande de le guérir. On sait que, l’homme Romain avait autorité sur toute sa maison, sa femme, mais aussi ses serviteurs. Il n’est donc pas impossible que cet homme ait eu des relations avec son serviteur. Jésus aurait donc pu lui dire que ce qu’il faisait était inadmissible. Mais que fait Jésus ? Il n’en dit mot. Il est prêt à aller chez ce centurion, mais celui-ci le retient, craignant peut-être que Jésus soit mal vu par les siens, parce qu’il entrerait dans la maison d’un non-Juif, de plus s’il pratique l’homosexualité avec son serviteur. Alors le centurion lui demande de guérir son serviteur à distance, confiant que Jésus a ce pouvoir-là. Et que dit Jésus ? Une quelconque critique ? Une condamnation ? Non, rien de tout cela ! Il relève la foi de ce centurion : « Je vous le dis, même en Israël, je n’ai pas vu une si grande foi ». C’est à la foi de ses interlocuteurs que Jésus est attentif, pas à leur comportement en matière de sexualité.

C’est quoi des eunuques ?

Et je vous disais que Jésus avait probablement rencontré des personnes homosensibles, donc des personnes qui n’ont aucune attirance pour des personnes de l’autre genre, et qui, de ce fait, ne peuvent assumer de se marier, comme c’était le cas de tous les hommes à cette époque. On en trouvait assurément parmi les eunuques. Dans cette société, se faire eunuque était la seule manière d’échapper au devoir conjugal ; il n’est donc pas impossible que certains se soient faits eunuques pour cette raison précise. Qu’est-ce que Jésus en dit ? Est-ce qu’il les juge ? Les critique ? Non, Jésus relève même que certains ont été eunuques dès le ventre de leur mère, laissant entendre que l’homosensibilité aurait ses racines déjà avant la naissance. Or, Jésus ne les change pas, ne les guérit pas, il relève qu’il y a des choses que ces personnes comprennent, du fait de leur grande sensibilité, que d’autres ne comprennent pas.

Ce qui compte pour Dieu

En Jean 6,28, lorsque la foule demande à Jésus « Que devons-nous faire pour accomplir les œuvres de Dieu ? », est-ce que Jésus répond « Vous devez avoir un parcours sexuel irréprochable ? » (je dis cela, car c’est ce que passablement d’églises laissent entendre). Non, il répond « l’oeuvre de Dieu, c’est que vous croyez en celui qu’il a envoyé ».

En d’autres mots, ce qui intéresse Dieu, ce n’est pas ce que nous faisons, dans la mesure où c’est compatible avec l’amour véritable, mais en qui nous croyons. Notre foi, notre attachement au Seigneur est le seul critère d’accès au salut.

Dieu ne rejette personne

Ainsi donc, si nous sommes profondément attachés au Seigneur, et que nous aspirons à aimer notre prochain comme nous-mêmes, nous n’avons pas à craindre de perdre notre salut. Notre Dieu est un Dieu fidèle, d’un amour incommensurable et qui ne rejette personne. « Je ne mettrai pas dehors celui qui vient à moi », dit Jésus.

Oui, c’est Jésus que nous devons suivre, lui qui est le seul visage de Dieu pour les humains. Aucune voix humaine n’a autorité pour le détrôner.

Et, comme dit Jésus dans l’Evangile de Luc, « On viendra de l’est et de l’ouest, du nord et du sud, (avec tous ceux et celles qui ont été rejeté, méprisés), et on se mettra à table (avec eux) dans le royaume de Dieu » (Luc 13,29).

Amen